Jean-Baptiste Joseph Willart de Grécourt , homme de lettres français né le 7 février 1684 à Vallières (Fondettes) et mort à Tours le 2 avril 1743.
FABLES:
- L’Epée et la balance
- Le Moineau et le Léopard
- La Guenuche et la jeune Chatte
- Le Oui et le Non
- Le Moineau et l’Hirondelle
- Le Cheval et la Levrette
- Le Bigarreau et le rasoir
- Le Bœuf et le Sacrificateur
- Le Canevas et l’Aiguille
- Le Gras de Jambe et le Tetton
- Le petit Chien
- La Jonquille et le Gratte-Cul
- Le Chat et la Minette
- La Nubilité et le jeune radix
- Le Canapé, le Lit et le Fauteuil
- Le Philosophe et l’Avocat
- L’Amour et le Respect
- L’Amour et l’Intérêt
- La Chenille et la Femme
- Le Mâtin et la Levrette
- L’Hirondelle et les Fourmis
- Le Perroquet et la Perruche
- La Rose
- Le Lys et la Violette
- Les Pigeons et les Moineaux
- Le Sansonnet et la Colombe
- Le Pinson fugitif
- Le papillon et les Tourterelles
- La Véronique et l’Aubépine
- Le Hérisson et la Taupe
- Le Chien Gascon
- Le Chien et le Moineau
- Le Rhinocéros et la Guenuche
- Le Pinson et la Tourterelle
- Le Cheval et le Chien
- La Poule et le Renard
- Les Tourtereaux et la Fauvette
- Le Hibou et la Tourterelle
- Les Moineaux et les Tourterelles
- Le Perroquet et le Pigeon
- Le petit Chien
- L’Abeille et le Sifflet
Epitaphe écrite par Grécourt :
Il est mort, le pauvre chrétien !
Molina perd un adversaire
Et l’amour un historien.
Si je consulte son bréviaire
La religion n’y perd rien.
Notice sur la vie de Grécourt :
Jean-Baptiste-Joseph Willart de Grécourt, naquit à Tours en 1684 – Des mémoires domestiques le font descendre, du coté paternel, d’une famille noble d’Écosse. Sa mère s’appelait Ourceau , originaire de Tours, et proche parente de messieurs Rouillé, qui sont originaires de Cette ville. Il était le cadet de plusieurs enfants. On l’envoya faire ses premières études dans la capitale : il annonça d’abord une grande facilité, beaucoup de dispositions : ce fut vraisemblablement ce qui détermina ses parents à le destiner à l’état ecclésiastique. En 1697, il fut pourvu d’un canonicat dans l’église de Saint-Martin de Tours sur la démission de M. l’abbé Rouillé, conseiller au parlement. Il débuta dans le monde par quelques sermons qui furent applaudis; mais, entraîné parle plaisir, il abandonna bientôt cette carrière dans laquelle il pouvait se promettre les plus grands succès. Quoique nous ayons de lui une foule de poésies libres, on n’en doit pourtant rien conclure contre son caractère : son cœur n’a jamais été complice des égarements de son esprit; la probité et les sentiments ont toujours parlé chez lui plus haut que le libertinage. Si on examine même de près ses ouvrages , on reconnaîtra aisément que la volupté, la délicatesse et le raffinement dans le plaisir y excluent partout la débauche , et qu’il avait, pour la crapule, l’horreur quelle inspire à tout honnête homme. Ce fut cette façon de penser qui lui ouvrit l’entrée des sociétés les plus illustres: il y parut comme Anacréon couronné de roses, et chantant les plaisirs au sein de la philosophie. L’amour et le vin lui inspirèrent ses premiers vers ;
… Le Philolotanus fut celui de tous ses ouvrages qui contribua le plus à le faire connaître : cette plaisanterie amusa toute la France; il n’y eut que les Jésuites qui ne purent la lui pardonner; aussi lui suscitèrent-ils coup sur coup mille traverses. Ils allèrent même jusqu’à le faire dénoncer au tribunal de conscience sur la fin de l’année 1723. Voici ce qu’on lit à ce sujet dans une de ses lettres . « Mes ennemis remuent ciel et terre pour avoir de mes poésies, prétendant y trouver des impiétés et des obscénités sans nombre, en quoi je me flatte qu’ils s’abusent ; la religion m’ayant toujours été respectable, et d’ailleurs ayant un talent particulier de dire des immodesties très modestement. » Nous ignorons les suites de cette dénonciation; cependant il est à croire qu’elle n’en eut point de fâcheuses pour notre auteur. – Il postula pendant longtemps une place de censeur. ” Si je parvenais , écrivait-il à son ami, à être censeur de livres, j’acquerrais l’estime et l’amitié des auteurs, parce que je n’aurais pas une cri-tique sèche, austère, orgueilleuse et pédantesque ; mais je les ferais convenir amicalement et amiablement, des fautes que j’aurais pu remarquer. Soyez, cher Déon, mon avocat auprès de M. Hérault, et que je sois, par votre entremise , tiré de la honteuse oisiveté où je languis dans la poussière provinciale. N’est-il pas affreux que je sois réduit, pour m’amuser, à faire une mauvaise fable ou quelque conte trivial, qui ne sied ni à mon, caractère, ni à mon inclination ! ” Dans une autre lettre adressée au même: ” J’ai sans cesse à me reprocher d’employer à des vétilles, souvent indignes de moi, de beaux jours qui devraient être destinés à quelque chose d’utile: j’attends toujours que notre illustre magistrat, M. Hérault, daigne attacher le grelot, qu’il me lance une bonne fois à l’eau , le vaisseau ira après tout de suite, et je me conduirais de façon que bientôt tout le monde voudrait s’intéresser à mon avancement. Malgré toute sa bonne volonté, M. Déon ne put rien eu faveur de son ami.
Une maladie considérable et douloureuse vint lui en annoncer la fin dans les premiers mois de l’année 1745. La lettre qu’il écrivit à M. Déon peu de jours avant sa mort, ne sera peut-être pas ici déplacée ; elle servira du moins à faire connaître les sentiments dans lesquels il mourut. « Depuis que j’ai reçu mes sacrements, je me trouve dans une tranquillité parfaite. Tes réflexions étaient vraies, et j’en éprouve l’effet. J’aurai de la force pour soutenir le pansement de sept plaies ; je compte guérir par la patience et le courage. Plût à Dieu que nous puissions accomplir un jour le projet d’une petite retraite qui, sans cagotisme , nous ramenât à la vraie religion ! Je suis charmé que nous pensions l’un comme l’autre là- dessus ; Pour moi, je le jure , je me métamorphoserais, et je ferais succéder des occupations sérieuses aux frivoles amusements dont j’ai toujours eu l’esprit rempli. J’ai des obligations infinies à Dieu ; il m’a enlevé aujourd’hui l’esprit de poète , pour me laisser penser en philosophe chrétien. Mille remerciements a M. le comte d’O…, qui me donne des marques d’une vraie amitié; mille compliments à la chère Caisse, a M. de L… à M. et à madame la présidente L… Adieu cher intime ; adieu véritable et sincère ami, je t’embrasse tendrement : la première fois j’espère t’écrire de ma main, quoique ( je l’avoue franchement ) j’aie une peste de pressentiment que je serai la dupe de tout ceci ; mes doigts allongés et chancelants désignent que je suis tout mourant: adieu, cher Déon, j’en ai trop fait. » Grécourt ne fut point trompé dans son pressentiment: cette lettre est datée du 21 mars 1743, et il mourut le 2 avril suivant. Il est inhumé an milieu de la nef de l’église de Saint-Martin de Tours.
… la saillie et l’épigramme étaient l’âme de ses conversations; mais ce genre d’esprit, toujours séduisant et toujours dangereux, lui suscita souvent, par ses imprudences, autant d’ennemis que d’amis. Plus savant qu’on ne se le fût imaginé, il semblait avoir oublié cette partie de son mérite qu’il faisait toujours céder à celui d’être homme aimable. Bon, conteur , bon plaisant , il avait surtout le talent de faire beaucoup rire , sans sortir lui- même de son sérieux ; libre avec les femmes , sans cesser d’être respectueux, la plus sévère eût été ; bien embarrassée pour se fâcher sérieusement contre lui ; enfin complaisant à l’excès pour ses amis , vrai , sincère et généreux , ennemi de l’intrigue et de la flatterie , il sut toujours allier les qualités d’un très-honnête homme, à celles d’un philosophe que le tempérament entraînait vers le plaisir par un ascendant que toutes les réflexions ne pouvaient détruire.
- Œuvres complètes de Grécourt , 1796