Un singe avec un ours, marchaient de compagnie :
Singe ou méchant , n’est qu’un; il lui prit fantaisie ,
Pour s’amuser dans cette occasion ,
De se moquer de son cher compagnon.
Vous avez, lui dit-il, la tournure élégante ;
Vous êtes beau, votre voix est charmante ,
Vous avez de l’esprit, vous êtes fort savant.
Vous faites le mauvais plaisant,
Lui répondit la lourde bote ,
Et je ne sais ce qui m’arrête
De corriger votre esprit goguenard :
Je voudrais savoir , par hasard,
S’il vous sied bien de parler d’élégance ;
Il n’est point d’animal en France
Plus laid que vous , qui vous croyez si beau ;
Quant à la voix, la vôtre est celle d’un corbeau ;
Vos grimaces font peur. — Parlez de mon adresse
De mes tours, de ma gentillesse ;
Monsieur l’ours, ce sont des talent
Qui plaisent aux honnêtes gens.
Les bons mots, les espiègleries
, Sont-ils pas nommés singeries ?
Vous voyez bien que je n’ai nul défaut ;
Mais vous , qui n’êtes qu’un lourdaut,
Quand vous dansez , la pitié nous fait rire :
De tous côtés on entend dire
Ce que j’ai dit en peu de mots.
L’ours ennuyé de ces mauvais propos ,
Appuie au singe , au milieu de la face ,
Un bon soufflet, il fit une sotte grimace.
De la société, pour goûter les douceurs,
Proscrivez avec soin tous les mauvais railleurs.
“L’Ours et le Singe “