Études sur les fables de La Fontaine, P. Louis Solvet – 1812
Conseil tenu par les Rats.
Faërne, fable 47
Même silence de la part de Chamfort sur cette Fable et la suivante. Nous avons déjà fait observer plusieurs omissions de cette nature dans le premier livre, et celle-ci n’est malheureusement pas la dernière, à beaucoup près. C’est apparemment ce qui a porté le savant éditeur des trois fabulistes, qui le premier a fait connoître les notes de Chamfort, à penser qu’il ne les avoit faites e quand il a voulu écrire son bel éloge du fablier, et l’on a cru, d’après cette assertion purement gratuite, qu’elles n’étoient en effet que ses rognures. Nous savons au contraire, de très-bonne part, que Chamfort n’a rédigé ses notes que long-temps après son panégyrique, et qu’il les a composées à la prière de madame Diane de Polignac, à qui il les avoit remises écrites de sa main , et rassemblées dans un petit volume joliment relié. S’il eût assez vécu pour les donner lui-même au public, il est à croire qu’ayant moins de raisons pour compter sur son indulgence que sur celle d’une dame aimable , dans la faveur de laquelle il vivoit, il n’eût rien négligé pour que son commentaire fut complet, et digne à la fois du sujet et de lui-même, de qui l’on étoit en droit d’attendre beaucoup.
V. 1. Un Chat nommé Rodilardus….
Dénomination empruntée à Rabelais : «Pentagruel « le voyant égratigné des griffes du célèbre chat Rodilardus. » (4—6) Rodilardus, rongeur de lard : l’inventeur de ce nom est, dit le commentateur de Rabelais, Elîsius Calentinus, un des illustres de Paul Jove. Quelqu’un trouvera peut-être que voilà un illustre tout-à-coup tiré de l’obscurité pour bien peu de chose.
Indépendamment de Faërne, que nous avons cité comme Fauteur original de cette Fable , Targa, Verdi— zoti, Régnier, ont encore, avant La Fontaine, traité ce sujet même avec assez d’agrément, mais ils se ressemblent torts à peu de chose près. La Fontaine seul y n’en prenant que la fleur, se l’est rendu tout-à-fait propre : incidents, moralité, style, et quel style, si l’on considère seulement les tons divers qu’il réunit! tout lui appartient dans cette Fable. N’est-ce pas créer qu’imiter de la sorte?.