Un âne était au service d’un jardinier. Comme il mangeait peu, tout en travaillant beaucoup, il pria Jupiter de le délivrer du jardinier et de le faire vendre à un autre maître. Zeus l’exauça et le fit vendre à un potier. Mais il fut de nouveau mécontent, parce qu’on le chargeait davantage et qu’on lui faisait porter l’argile et la poterie. Aussi demanda-t-il encore une fois à changer de maître, et il fut vendu à un corroyeur. Il tomba ainsi sur un maître pire que les autres. En voyant quel métier faisait ce maître, il dit en soupirant : « Hélas : malheureux que je suis ! j’aurais mieux fait de rester chez mes premiers maîtres ; car celui-ci, à ce que je vois, tannera aussi ma peau. »
Cette fable montre que les serviteurs ne regrettent jamais tant leurs premiers maîtres que quand ils ont fait l’épreuve des suivants.
- Esope – (VIIe-VIe siècle av. J.-C)
Asinus ad Senem Pastorem
In principatu commutando civium
Nil præter domini nomen mutant pauperes.
Id esse verum, parva hæc fabella indicat.
Asellum in prato timidus pascebat senex.
Is hostium clamore subito territus
Suadebat asino fugere, ne possent capi.
At ille lentus Quæso, num binas mihi
Clitellas impositurum victorem putas?
Senex negavit. Ergo, quid refert mea
Cui serviam, clitellas dum portem meas?
- Phedre – (14 av. J.-C. – vers 50 ap. J.-C.)
L’Âne et le vieux Pâtre
Dans un changement de gouvernement, rien ne change pour le pauvre que le nom du maître. C’est une vérité que prouve cette petite fable
Un vieillard craintif faisait paître son âne dans une prairie. Effrayé tout à coup par les cris des ennemis, il conseille à son Âne de fuir, pour éviter d’être pris tous deux. Mais celui-ci sans bouger : « Le vainqueur, dites-moi, me fera-t-il porter double bât? — Non, repartit le Vieillard. — Alors que me fait à moi qui je serve, puisque je dois toujours porter mon bât?
- Fable de Phedre traduite par Ernest Panckoucke (1808 – 1886)