De folâtres enfants jouaient un jour aux noix ;
Esope, nous dit-on, se mit de la partie ;
Lors un Athénien s’arrête, et dit : Je vois
Que ta haute sagesse enfin s’est démentie ;
Te voilà fou, bonhomme. Esope, au même instant
Prend un arc, le détend, et le pose par terre.
Regarde bien, dit-il, c’est là tout mon mystère ;
Devine si tu peux, toi qui fais l’important.
Soudain le peuple accourt. Se creusant la cervelle,
Il faut voir réfléchir notre pauvre moqueur ;
Trois fois de son esprit l’effort se renouvelle ;
Il succombe trois fois ; et le vieillard vainqueur
De la sorte parla : Pour faire bon usage
D’un arc, il faut savoir le détendre à propos,
Autrement il se rompt. C’est ainsi que le sage
A son esprit parfois accorde du repos,
Pour savoir à son gré, la fatigue passée,
Le trouver de nouveau plus apte à la pensée.
“Esope jouant aux noix, par Boyer-Nioche”
- Jean-Auguste Boyer-Nioche, 1788-1859