De son souffle amoureux le Zéphyr caressait
Une Rose que mai venait de faire éclore.
On eût dit qu’elle en rougissait;
Et belle qui rougit parait plus belle encore.
Sur elle, de fort loin vle regard se fixait.
Reine de l’empire de Flore,
Sa fraîcheur égalait la fraîcheur de l’Aurore,
Si même elle ne l’effaçait ;
Mais que son règne, hélas ! fut de courte durée !
Le jour suivant, au lieu de l’embellir,
La fit déchoir. Son teint commençait à pâlir.
Ce n’était plus la Rose applaudie, admirée ;
Les feux du jour l’avaient presque décolorée.
Au troisième matin, adieu tous ses appas !
On ne lui voyait plus qu’une ombre d’existence.
Le ruisseau le lui dit. Elle n’en convint pas;
Mais elle soupira tout bas,
Et sa voix accusa le Zéphyr d’inconstance.
Volage, disait-elle, as-tu pu délaisser
La fleur que ton haleine aimait à caresser?
Ma langueur est l’effet de ta fuite soudaine.
Vers moi que l’Amour te ramène !
A ton souffle, mon teint redeviendra vermeil;
Et, tout-à-coup rendue à ma beauté première,
J’éclipserai les fleurs, comme on voit le soleil,
Sitôt qu’il rouvre sa carrière,
Des astres de la nuit éclipser la lumière.
Le Zéphyr, qui l’entend du bocage voisin,
Accourt, veut ranimer la Rose languissante ;
Mais, à peine la fleur ouvre-t-elle son sein
A son haleine caressante,
O rigoureux destin ! ô remède fatal !
La voilà qui se décompose.
Ses feuilles, sans honneur, jonchent le sol natal,
Et Zéphyr cherche en vain la Rose.
Belles, quand, sur votre déclin,
Le fol Amour vous a quittées,
Laissez-lui faire son chemin,
Et de le rappeler ne soyez point tentées.
“La Rose et le Zéphyr”