(Louise Labé, et autres)
« Mon fils, la caduque Vieillesse
» Se plaint à moi que tu la fuis.
» Pourquoi dédaignes-tu les vœux qu’elle t’adresse ?
» Sa longue expérience, et sa mûre sagesse
» Sources de bons conseils, t’assureroient les fruits
» Du soin que tu prendrois d’alléger ses ennuis. »
Ainsi parloit Vénus. Le fils de la déesse
Va, pour complaire à son désir,
Rendre visite à la Vieillesse.
Il n’avoit pas loin à courir ;
Plus aisément qu’ailleurs on la trouve à Cythère.
Amour partit en petit train,
Et peu content, dit-on, d’offrir son ministère
A gens qui ne le hantent guère.
Mais par bonheur en son chemin
Il trouva l’aimable Folie,
Nymphe qu’il a souvent précédée ou suivie,
Et dont il est aimé, comme il l’aime à son tour.
On s’aimeroit à moins, car elle est de l’Amour
Sœur utérine : on croit que Momus fut son père.
« Je ne pouvois, lui dit son frère,
» Te rencontrer plus à propos.
» Prends cet arc à la main, ce carquois sur ton dos.
» Aux plus clairvoyants je défie
» De te distinguer d’avec moi.
» Va, c’est bien mieux ton fait, t’acquitter de l’emploi
» Que notre mère me confie. »
Si bien s’en acquitta la friponne de sœur,
Qu’abusée à jamais, la Vieillesse en son cœur
Croyant loger l’Amour, hébergea la Folie.
“La Vieillesse, l’Amour et la Folie”