Alexis Rousset
Poète et fabuliste XVIIIº – L’Ambition la Pauvreté et le Plaisir
Je veux le répéter sans cesse :
Le pauvre a des plaisirs qui valent ceux des rois.
Qu’ai-je dit ? il a quelquefois
Au fond du cœur bien plus d’ivresse.
Arrière ce dépit qui trop souvent l’oppresse !
Les seuls vrais biens sont, je le crois,
La santé, le bon sens, la gaîté, la sagesse…
L’amitié… j’y pourrais joindre encor la jeunesse.
L’Ambition, un jour, rencontra le Plaisir,
Voyageant avec une femme:
C’était la Pauvreté. L’Ambition s’enflamme,
En voyant le dieu, d’un désir
Qui n’est pas commun dans son âme,
Elle veut aussi s’amuser.
— Laissez-la celte misérable,
Dit-elle au dieu. Je suis aimable,
Vous ne sauriez me refuser;
Nous allons voyager ensemble. — Une déesse !
Non, j’aime mieux cette pauvresse. —
— Vous vous ferez bien mépriser. —
– Nous nous convenons peu, vous et moi.- Je le nie. _
— Jamais pourtant, assure -t-on,
Le Plaisir et l’Ambition
N’ont pu marcher de compagnie. —
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A ces mots le dieu s’éloigna ;
La Pauvreté le regagna.
Alexis Rousset , L’Ambition la Pauvreté et le Plaisir