L’épais Mondor, de grand matin,
C’est-à-dire à midi, roulait en équipage.
Pour se donner les airs d’un savant personnage,
Il veut être conduit dans ce pays latin
Que parcourent à pied le pédant et le sage ;
L’un, pour trouver quelque bouquin,
Et l’autre, quelque bon ouvrage.
Mondor s’arrête, avec son étalage,
Chez un des héritiers d’Étienne ou de Barbin;
Et le voila, tout couvert de dorure,
Dans la docte boutique. Il prend un alphabet ?
A ses yeux étalant superbe couverture :
( De l’offrir au dauphin l’on avait le projet. )
« Sans ce pompeux habit, dit-il, triste brochure,
« Ton prix est nul. » — « Et toi, répond, pour le livret,
De sa cage un bon sansonnet,
Un peu railleur de sa nature ;
« Et toi, messire Turcaret ,
« Que vaudrais-tu sans ta parure? »
Gonflés d’orgueil, combien de grands
N’ont de valeur que par leur entourage !
Mauvais tableaux , riches encadrements ,
De nos jours sont fort en usage.
N’accordons pas notre suffrage ,
Sur la simple apparence, ainsi que bien des gens.
Pour le mérite seul réservons notre encens.
“Le Financier, l’Alphabet, et le Sansonnet”