Un homme sage est toujours disposé à reconnaître ses torts»
Le point disait à la virgule :
« Oses-tu bien te comparer à moi?
— Je suis, dit la virgule» utile autant que toi,
— Cette prétention est au moins ridicule,
Lui répliqua le point. Peux-tu, sans mon secours,
De la phrase arrêter ou suspendre le cours?
— Voilà, dit la virgule, ou conduit l’ignorance!
A la phrase, il est vrai, comme un coupe-jarret ,
En lui sautant au cou, l’arrêtant court et net,
Tu fais sentir le joug de ta puissance;
Mais, voisin, quand la phrase en sons harmonieux,
De son urne au flot pur épanche l’abondance ,
Est-ce toi qui soutiens et règles sa cadence,
Et lui fais éviter tous les sauts périlleux ?
Pour empêcher les mots de se prendre aux cheveux,
Sais-tu les tenir à distance?
Est-ce toi qui maintiens et fixes l’ordre entre eux?
— Je fais plus, dit le point, et je fais beaucoup mieux.
D’un noble sentiment faut-il poindre l’extase,
J’arbore l’étendard de l’admiration… (!)
Faut-il donner un tour vif à la phrase,
Je me transforme en point d’interrogation… (?)
L’auteur ne peut-il plus, dans l’ardeur qui l’enflamme,
Exprimer par des sons ce qu’il sent dans son âme.
Je sonne le tocsin de l’exclamation (!!!)
La virgule, à ce coup, confessa sa défaite :
La dispute cessa ; la paix entr’eux fut faite.
Puissent ainsi finir tous les autres débats,
Qu’ont entre eux les potentats !
Que sa place au soleil soit grande ou bien petite,
Ceci prouve, au surplus, que tout être ici-bas
Est entiché de son mérite.
“Le Point et la Virgule”