Un jour, maître Corbeau, sur un arbre perché
Tenait entre son bec un fromage glacé :
Lorsque maître Renard, attiré par l’odeur,
L’accoste poliment par ce propos flatteur.
Sur l’air du tra la la la, (bis.)
Sur l’air du tra déri déra, Tra la la
Bonjour, maître Corbeau, comment nous portons-nous!
Merci, maître Renard, ça va pas mal, et vous,
Et mes enfants aussi, hors mon p’tit nouveau-né,
Qui par ces derniers froids s’est très fort enrhumé
A l’air du tra la la, etc.
Peste! mon cher Corbeau, vous êt’s joliment mis!
Vous vous faites pour sûr habiller à Paris?
Oui, répond le Corbeau à ce propos railleur,
Puis il offre aussitôt l’adress’ de son tailleur.
Sur l’air du tra la ta, etc.
Vraiment si vot’ ramag’ ressemble à vot’ pal’tot?
Vous enfoncez Duprez, Lablacbe et Mario;
Chantez-moi donc quéqu’chose, une ariette, un rien,
Car dans votre famille on est fort musicien.
Sur l’air du tra la la, etc.
Alors maître Corbeau, sans se faire prier,
Entonne sans façon le grand air du Barbier.
Mais comme il faut ouvrir la bouche pour chanter,
Il laiss’ tomber par terr’ son fromage glacé.
Sur l’air du tra la la, etc.
Soudain maître Renard, qui comptait là-dessus,
Saute sur le fromage et rit comme un bossu;
Puis il dit au Corbeau, je vous ai fait poser!
Vous n’êtes pas bien mis ! vous n’ savez pas chanter !
Pas mêm’ le tra la la, etc.
En entendant ces mots, le Corbeau, confondu,
S’écrie : eh! quel malheur, le duel est défendu,
je suis volé, dupé ! maudit soit le destin !
Êtr’ doyen des Corbeaux! et passer pour un s’rin.
Sur l’air du tra la la, etc.
MORALITÉ,
Or donc, de ces couplets la moral’ la voici :
Corbeaux petits et grands, retenez bien ceci :
C’est qu’il est maladroit, a dit un vieux gourmand,
Quand on aim’ le fromag’ de parler en mangeant.
Sur l’air du tra la la la (bis.)
Sur l’air du tra déri déra, Tra la la !
Paroles d’un anonyme.Le Renard et le Corbeau
La musique se troure, à Paris, chez M. Brûlé, éditeur, 16, passage des Panoramas.