Phèdre a dit quelque part qu’un renard des plus saints
Entreprit un pèlerinage;
Et que mourant de soif un jour en sou voyage,
Il vit au haut d’un mur de superbes raisins.
Jamais raisins n’excitèrent l’envie Comme ceux-là :
» Dieux protecteurs ! merci, le renard s’écria
» Les yeux au ciel, je renais à la vie.
» Déjà je perdais tout espoir
» Quand votre bonté secourable
» Me les a fait apercevoir.
» Qu’ils sont beaux ! Que leur jus doit être délectable!…
» Voyons, sans plus tarder essayons de cueillir
» Une de ces grappes vermeilles,
» Jamais, foi de renard, je n’en vis de pareilles.
» Mais il a beau sauter, il ne peut parvenir
Jusqu’au sommet de la muraille.
Il va, vient, puis revient, tourne et tourne cent fois
Autour du mur. Enfin se voyant aux abois :
» Fi! ces raisins sont verts et bons pour la canaille,
» Dit-il tout haut. Partons, je perds ici mon temps. »
Il est dans l’univers beaucoup de telles gens.
« Le Renard et les Raisins par Paul Steven »
Paul Stevens, 1830 – 1881