L’éloge de La Fontaine, qui a été fait par Fénelon, sous forme d’une version latine, que ce prélat donna à traduire à son élève le duc de Bourgogne, et qui a pour titre :
in Fontani mortem .
Hélas! il n’est plus l’auteur, au bon sens enjoué, qui égala Ésope et surpassa Phèdre, dans l’art de badiner ; l’auteur qui prêta la voix aux bêtes,pour donner aux hommes des leçons de sagesse.
Hélas! La Fontaine n’est plus. ô douleur! c’en est fait des jeux spirituels, des ris badins, des tableaux gracieux et des leçons ingénieuses et poétiques.
Pleurez,vous qui goûtiez sa gaieté ingénue, son amour pour la simple nature, son élégance sans apprêt et sans fard! A lui, à lui seul, parmi les auteurs,on passa quelques négligences, parce que sa négligence avait tant de charme qu’elle l’emportait sur un style plus soigné.
Qu’une tête si chère mérite de regrets ! Pleurez, nourrissons des Muses!
Il vous reste, au moins, une consolation, c’est que les beautés, renfermées dans ses vers, ses amusants badinages, ses plaisanteries attiques, et sa grâce charmante et persuasive vivent et vivront toujours. La Fontaine, à raison désagréments de son esprit, mérite d’être rangé non parmi les modernes, comme le voudrait l’ordre des temps, mais parmi les anciens.
Lecteur! si tu doutes de la justesse de mes paroles, ouvre toi même le livre. Qu’en penses-tu? Il badine comme Anacréon. Il chante sur sa lyre comme Horace, lorsqu’il est libre de désir, ou emporté par la passion. Qu’il parle des mœurs ou du caractère des hommes, dans ses fables, sa peinture, à cet égard, est aussi vivante que celle de Térence dans ses comédies. Ses vers, comme ceux de Virgile, sont doux et élégants, dans son petit ouvrage.
Oh! quand donc les favoris de Mercure (les poètes lyriques) auront ils l’éloquence de ses personnages à quatre pattes!