Jeunes enfants ont toujours eu la rage
De dénicher et merles et pinsons,
Et toutes sortes d’oisillons.
Sur trente qu’ils mettent en cage,
A peine un seul survit; et certes c’est dommage !
Moins d’oiseaux, et moins de chansons ;
Moins de plaisirs dans le bocage.
Mais aux enfants qu’importe le ramage ?
C’est l’oiseau qu’ils veulent tenir ;
C’est leur manière de jouir.
Et plus d’un homme fait n’en sait pas davantage.
Un marmot s’en vient donc apporter, tout joyeux.
Un nid de fauvette à sa mère .
Jamais il ne fut si heureux.
Bonheur si grand ne dure guère.
Le même soir, un jeune chat
Fit son souper de la nichée.
L’enfant cria, pleura, fit tel sabbat.
Qu’on aurait dit une Hélène enlevée ;
Et la mère de dire alors :
” Pourquoi ces pleurs, cette colère ?
De quel côte sont donc les torts ?
Le chat n’a fait, mon fils, que ce qu’il t’a vu faire :
Tu fus bien plus cruel à l’égard des parents
De ces oiseaux innocents :
Juge de leur douleur amère,
Par la peine que tu ressens .
Les maux que nous causons doivent être les nôtres ;
Mon fils, quand tu voudras jouir.
Fais en sorte que ton plaisir
Ne soit pas le tourment des autres.»
“L’Enfant dénicheur”