Au temps de la moisson se trouvaient côte à côte
Deux épis : l’un courbé sous le poids de son grain;
L’autre vide, et portant sa tige droite et haute.
Celui-ci, d’un ton leste et vain,
Ose apostropher sou voisin,
Lui faisant en ces mots la guerre :
« Cher camarade, en vérité,
Je dois blâmer en toi l’excès d’humilité.
Eh quoi ! baiser ainsi la terre.
Tandis que moi. bercé sur l’aile du zéphyr.
Je plie et me redresse au gré de mon désir ?
— Frêle épi ! tu n’y songes guère.
Lui répondit l’autre aussitôt :
Si tu portes la tète en haut,
C’est signe que tu l’as légère, »
J’aime fort ce mot, quant à moi :
Il s’applique à bien des cervelles.
Et maint petit-maître, je crois,
Pourrait en dire des nouvelles.
“Les deux Epis”