Un pauvre diable était estropié
Dès le jour où dame nature
Avait par hasard oublié,
Sur double pied de monter sa stature.
Le pied droit, du moins, lui restait.
Et celui-ci nourrissait l’espérance
De suffire au corps qu’il portait.
Mon homme veut s’exercer à la danse,
Mais il ne peut faire des entrechats.
Mû par une affaire importante,
Il veut courir, mais il fait un faux pas,
Et sur une route glissante,
Voulant marcher, il se casse le bras.
Lors il revient trouver dame nature;
D’un second pied il invoque l’appui,
Et par bonheur, en cette conjoncture,
Un tel prodige est opéré pour lui.
Il a deux pieds ; entre eux s’établit l’harmonie.
Notre homme danse et court dès ce moment,
Et les deux compagnons pendant toute la vie
S’aident et vont heureusement.
De la tendresse fraternelle
Tels sont les fruits.
Deux frères bien unis
Auront une carrière et plus douce et plus belle :
La nature en lit deux amis.
“L’Estropié “