Une pauvre savate eut, un jour, le malheur
De heurter, ou plutôt d’effleurer par mégarde
La pantoufle d’un grand seigneur.
— Tu paîras cette audace, ignoble campagnarde !
Lui dit, en la rouant de coups,
La noble pantoufle en courroux.
L’autre supporta sans se plaindre
Cet outrage et, plus tard, tant d’autres, qu’à la fin
Elle se révolta, lasse de se contraindre.
Et l’on put voir, un beau matin,
La savate aux gros clous, à la rude semelle,
Déchirer en mille débris
La pantoufle naguère insolente et cruelle.
Grands, qui prenez plaisir à vexer les petits,
C’est à vous que ceci s’applique.
Souvenez-vous que, dans le fait,
Pantoufles de seigneur, savates de valet,
Sortent de la même boutique.
“Pantoufles et Savates”