Geno Namy
Poèmes et Fables – Pavane pour un oiseau déchu
« Flûte et carabistouille ! »
Le paon tape du pied.
—Où sont passés mes ocelles,
Ceux qui font ma fierté ?
Hier encore je me pavanais,
Les belles n’avaient d’yeux que pour moi…
Que me reste-t-il ? de vilaines plumes nues ! »
Il se traîne, pantelant, va de soue en étable,
Se plaint, gémit, cherche une oreille bienveillante
Personne ne lui vient en aide,
L’orgueilleux n’a que ce qu’il mérite !
Ses pairs de basse-cour ricanent de sa pantomime.
Piteux, il s’éloigne, lui et sa traîne, va vers les gens de ferme.
En grande réception dans la salle commune, fenêtres ouvertes,
Tous font grand bruit ; ces dames caquètent, ces messieurs rient.
Notre paon risque un œil, et se trouve ébloui
Par des reflets changeants, vert, bleuté, mordoré.
Ses ocelles scintillent, voletant de chef en coiffe,
Dans un ballet que le pantois découvre avec mépris :
—Sont-ce là des manières, voler mes attributs !
Font-elles seulement la roue, elles n’en sont pas capables !
Ça frôle le ridicule, j’aimerais mieux me pendre
Que faire ainsi la cour devant des mécréants ! »
De dépit le paon pleure, plus jamais ne plaira
Ses plumes ne pousseront plus il perd de sa superbe.
Paraître n’est pas être
Mieux vaudrait consacrer sa vie à l’essentiel
Que de perdre son âme dans le superficiel.
Geno Namy