Un Homme se sentant piqué par une Puce, mit le doigt dessus et la prit. Elle lui dit pour s’excuser, que c’était sa manière de vivre, et que la nature lui avait donné ce talent ; qu’au reste elle ne faisait pas grand mal, et que ses morsures n’étaient nullement dangereuses. Elle pria l’Homme très instamment de la mettre en liberté, et de la laisser vivre, puisqu’il n’avait rien à appréhender d’elle. ” Tu t’abuses, lui répondit-il en souriant, tu fais tout le mal que tu peux ; c’est pour cela qu’il faut que je te tue ; car il ne faut jamais offenser personne, ni faire à qui que ce soit aucun outrage, ni léger, ni considérable. “
Autre version
” La Puce et l’Homme “ – Un jour une puce incommodait un homme sans relâche. Il l’attrapa et lui dit : « Qui es-tu, toi qui t’es repue de tous mes membres, en me piquant à tort et à travers ? » Elle répondit : « C’est notre façon de vivre ; ne me tue pas ; car je ne puis pas faire grand mal. »
L’homme se mit à rire et lui dit : « Tu vas mourir tout de suite, et de ma propre main ; car quel que soit le mal, petit ou grand, il faut absolument l’empêcher de se produire. »
Cette fable montre qu’il ne faut pas avoir pitié d’un méchant, quel qu’il soit, fort ou faible.
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Esope – (VIIe-VIe siècle av. J.-C)
L’ Homme et la Puce
Par des voeux importuns nous fatiguons les dieux,
Souvent pour des sujets même indignes des hommes:
Il semble que le Ciel sur tous tant que nous sommes
Soit obligé d’avoir incessamment les yeux,
Et que le plus petit de la race mortelle,
A chaque pas qu’il fait, à chaque bagatelle,
Doive intriguer l’Olympe et tous ses citoyens
Comme s’il s’agissait des Grecs et des Troyens.
Un sot, par une puce eut l’épaule mordue;
Dans les plis de ses draps elle alla se loger.
«Hercule, se dit-il, tu devais bien purger
La terre de cette hydre au printemps revenue.
Que fais-tu, Jupiter, que du haut de la nue
Tu n’en perdes la race afin de me venger? »
Pour tuer une puce, il voulait obliger
Ces dieux à lui prêter leur foudre et leur massue.
- Jean de la Fontaine – (1621 – 1695)
L’ Homme et La Puce
Un Homme se sentit
Piqué par une Puce ;
Entre ses doigts, il la prit ;
Pour s’excuser, elle lui dit :
« N’y voyez aucune astuce,
C’est ainsi que je me délivre
De ma faim sanguinaire,
C’est ma manière de faire,
Telle que la Nature m’ordonne de vivre.
Mes petites morsures
Ne font graves blessures :
Convenez que je ne mords point comme un fauve.
Acceptez mes excuses
Et, malgré mon geste, laissez-moi la vie sauve. »
L’homme, souriant, lui répondit : « Tu t’abuses,
Nuisible animal,
Avec tout ce blabla
Car tu fais tout le mal
Que tu peux ; pour cela,
Il faut que je te tue ;
Malgré ce que l’on pense,
Personne ne peut rester comme une statue
Devant une offense ;
L’outrage est intolérable,
Qu’il soit minime ou immense. »
Dans notre seconde fable,
La personne manquant d’audace
Et ne percevant donc les choses qu’en surface
Y comprendra à sa lecture
( Cela n’en est pas le but, mais l’idée est sûre )
Qu’il faudrait mettre d’abord de la méfiance
Là où nous plaçons trop vite notre confiance…
- David Claude – (fabuliste contemporain)