Un Laboureur fâché de voir que les Grues et les Oies sauvages mangeaient ses blés dans ses champs, tendit des filets pour les surprendre. Il prit aussi avec elles une Cigogne, qui le pria très instamment de la remettre en liberté, lui représentant qu’elle n’était ni Grue, ni Oie sauvage, et qu’elle ne lui avait jamais fait de dégât, puisqu’elle ne mangeait ni herbes ni grains. Elle lui dit encore, pour l’attendrir, qu’elle servait ses parents avec une piété sans exemple, et qu’elle les secourait charitablement dans leur extrême vieillesse. Le Laboureur, sans faire attention aux remontrances de la Cigogne, se mit à sourire. ” Je conviens de tout ce que tu dis, répliqua-t-il ; mais puisque tu es prise avec les autres Oiseaux, il faut que tu meures aussi avec eux. “
Autre version
“L’Oiseleur et la Cigogne” – Un oiseleur, ayant tendu des panneaux aux grues, surveillait de loin sa chasse. Or une cigogne s’étant posée parmi les grues, il accourut et la prit elle aussi avec elles. Comme elle le priait de la relâcher, disant que, loin de nuire aux hommes, elle leur était même fort utile, car elle prenait et mangeait les serpents et autres reptiles, l’oiseleur répondit : « Si vraiment tu n’es pas méchante, tu mérites en tout cas un châtiment pour t’être posée parmi des méchants. »
[quote]Nous aussi nous devons fuir la société des méchants, afin qu’on ne nous prenne pas nous-mêmes pour les complices de leur méchanceté.[/quote]-
Esope – (VIIe-VIe siècle av. J.-C)
[quote]
Porter la peine pour les maulvais.
Avec les meschantz ne te mectz,
Vueil!e-loy d’iceux estranger,
Qu’il ne t’en vienne aulcun danger.
Tel l’achepte qui n’en peult més.
Du laboureur et de la Cigoigne
Ung Rusticque
Si s’applicque
A prendre aux rethz à couvert
Grues coies, .
Et les Oyes,
Qui mangcoient son bled en vert.
Oyes, Grues,
Retenues
Furent aux rethz et ficelles.
La Cicoigne
Ne s’esloigne,
Mais fut prinse avec icelles.
Salut quiert,
Et requiert
Au laboureur sa franchise,
Point ne pense
Quelque offense
Avoir contre luy commise.
Tu mourras,
Et n’auras
(Dict le laboureur) mercy.
Qui s’y treuye,
Il espreuve
Qu’à chastun on faut ainsi.
- Gilles Corrozet (1510 – 1568)