Il ressemble au chien de Jean de Nivelle,
il s’enfuit quand on l’appelle. Personne n’ignore que la maison de Montmorency, une des plus anciennes et des plus illustres maisons de France, a produit une foule d’hommes célèbres; mais ce. que beaucoup de gens ne savent pas, c’est qu’elle est la source d’un de nos proverbes, trop commun pour n’avoir pas besoin d’une origine illustre. Jean de Montmorency, seigneur de Nivelle, embrassa le parti du comte de Charolais, fils du duc de Bourgogne, et si fameux par la suite sous le nom de Charles-le-Téméraire, contre le roi Louis XI, dans la guerre dite du bien public. Son père fut si indigné de cette rébellion, qu’après l’avoir fait sommer à son de trompe pour rentrer dans le devoir, sans qu’il comparût, il le traita de chien. Cette épithète, qui nous paraît seulement malhonnête et grossière, fut prise par le peuple dans une acception si odieuse, que, la regardant comme l’expression d’une juste et franche indignation, il voulut la consacrer par le dicton proverbial en question, qu’on appliqua par la suite aux gens peu complaisants , qui ne répondent point aux appels qu’on fait à leur obligeance, et qui aiment mieux s’esquiver que de rendre le plus léger service. Le Dictionnaire de Trévoux donne à ce proverbe une origine toute différente. Jean de Montmorency, seigneur de Nivelle, ayant donné un soufflet à son père, fut cité au parlement, et sommé à son de trompe de comparaître en justice. Mais, au lieu de répondre à l’assignation, il se hâta de fuir en Flandre, dans les propriétés de sa femme. L’horreur qu’inspira une action si indigne de la part d’un fils à l’égard de son père, le fit traiter de chien.
La Fontaine a employé ce proverbe dans la fable du Faucon et du Chapon.
Une traîtresse voix souvent vous appelle ;
Ne vous pressez donc nullement :
Ce n’était pas un sot, non, non, et croyez-m’en,
Que le chien de Jean de Nivelle.
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