Groupe sculpté de la Charité de Saint Martin
Trois ans d’absence, après quatre siècles de présence, le groupe sculpté de la Charité de Saint Martin datant du XVI° siècle, est revenu en dévoilant toutes ses splendeurs retrouvées. Ce retour a été fêté comme il se doit dans l’Église Saint Martin d’Attainville le 11 novembre 2015. Rénovée, la sculpture a retrouvé sa console, éclairée par la lumière douce et tamisée du vitrail. Sur son socle, dorénavant et pour très longtemps encore, Saint Martin veillera sur l’église d’Attainville.
En 1713, selon le Registre Paroissial, la population d’Attainville était de 77 feux, soit environ 300 habitants. Lorsque la construction de l’église actuelle fut terminée en 1574, la population devait être bien inférieure, de l’ordre de 100 à 150 habitants. Attainville était alors un petit village édifié au milieu des terres agricoles à proximité de la Route Royale 1, qui menait à l’Abbaye de Royaumont construite par le Roi Saint Louis. Comment alors ce bourg agricole, isolé au milieu des terres, a-t-il pu édifier une telle église, classée Monument Historique en 1912 ? Tout simplement parce que les terres, exploitées par des fermiers-laboureurs, étaient la propriété des Célestins de Paris, puissant Ordre religieux situé au centre de Paris. Les Armoiries des Célestins figurent d’ailleurs sur plusieurs vitraux et en particulier sur l’extraordinaire vitrail datant de la construction de l’église, le vitrail des « Litanies de la Vierge », chef d’œuvre de l’art du vitrail à la Renaissance. La seule trace de la précédente église du 12ème siècle est la pierre tombale, remarquablement conservée, de « DAME YDOINE DATEINVILLE », décédée en 1285.
Les siècles ont passé et ce bel édifice a subi les dégradations qui, à terme, amèneront à sa ruine si rien n’est entrepris. Quelques amoureux du Patrimoine ont créé l’Association ARESMA (Association pour la restauration de l’église Saint Martin d’Attainville) et signé un partenariat avec la Fondation du patrimoine afin de collecter des fonds. Leur but peut se résumer de manière brève : ne pas laisser se détruire, ce que nos ancêtres ont su construire !
Des études sont en cours pour déterminer les causes des déformations que subit l’édifice afin d’établir un plan de travaux pour sa sauvegarde. Pour sensibiliser la population et faire vivre culturellement l’église, des concerts sont organisés au cours desquels les voix et la musique trouvent un écrin remarquable grâce à son extraordinaire acoustique. Site de l’Association ARESMA
Guy Le Ray
ÉGLISE SAINT MARTIN D’ATTAINVILLE
Dans un village de la plaine de France
Se dresse une belle église Renaissance,
Portant fièrement un clocher majestueux,
Pointant vers le ciel ses pots à feu.
Que d’histoires recèlent ces vieilles pierres,
Assemblées par des compagnons,
Guidés par un Maître maçon.
Que de foi, de puissance téméraire
Révèlent un tel monument, exempt d’artifice.
Les ans ont passé, fragilisant ce sanctuaire,
Mettant en danger ce bel édifice.
Cinq siècles plus tard, des compagnons d’un autre âge
Se mobilisent pour sauver ce vaisseau de pierres,
Portant en guise d’oriflamme ce seul adage :
Ne pas laisser se détruire,
Ce que nos ancêtres ont su construire !
Guy Le Ray
Saint Martin, “le XIII° apôtre”… l’apôtre des Gaules.
Texte publié par Sébastien Louis Saulnier, 1846 – Saint Martin était fils d’un soldat romain, tribun dans l’armée impériale, et vivait sous le règne de Constantin. Ses parents étaient païens ; quant à lui, touché dès son jeune âge des vérités du christianisme, il fut reçu dès quinze ans parmi les catéchumènes. Avant d’avoir pu être baptisé, il fut enrôlé dans la cavalerie, et envoyé dans la Gaule. Malgré sa jeunesse et la licence de sa profession, saint Martin donna le plus bel exemple de toutes les vertus chrétiennes si bien en rapport avec le courage du soldat. Par son humilité, sa douceur, sa sobriété, sa retenue, et principalement par son inépuisable charité, non-seulement il excita l’admiration de tous ses camarades, mais encore il s’acquit leur affection. La légion dans laquelle il servait était à Amiens vers 332. L’hiver de cette année fut d’une rigueur telle que les hommes tombaient morts de froid sur les chemins. II arriva un jour que saint Martin, en passant aux portes de la ville, rencontra un pauvre nu, à moitié mord de froid. Lui n’avait que ses armes et son manteau. Il tira son épée, et coupant son manteau, il donna une moitié au pauvre, et se couvrit le mieux possible avec l’autre.
La même nuit, dans son sommeil, Jésus-Christ lui apparut en songe, couvert de la moitié du manteau qu’il avait donnée au malheureux. Jésus-Christ, s’adressant aux anges qui l’environnaient, leur dit : « Voilà celui qui m’a ainsi couvert, mon serviteur Martin; bien qu’il ne soit pas baptisé, il a fait cela.» Saint Martin s’empressa de recevoir le baptême; il était âgé de dix-huit ans.
Il resta dans l’armée jusqu’à l’âge de trente-cinq ans ; mais ayant conçu le projet de se vouer à la vie religieuse, il demanda son congé. L’empereur, c’était Julien l’Apostat , suivant la légende , lui reprocha sa faiblesse, disant qu’il ne cherchait qu’un moyen d’échapper au danger. Mais saint Martin lui répondit avec fermeté : « Place-moi nu et sans armes au premier rang des légions, et tu verras si, protégé par la croix, je redouterai la rencontre de l’ennemi. » L’empereur accepta le défi, et exposa saint Martin pendant toute une nuit. Le matin même les barbares demandèrent à capituler. Ainsi la foi de Saint Martin procura la victoire.
Après avoir quitté l’armée, il mena pendant de longues années la vie religieuse; enfin, vers 371, il fut élu évêque de Tours. Investi de cette haute dignité, il ne fut pas moins remarquable qu’auparavant par sa grande charité et son humilité. Un jour il était sur le point de dire sa messe à la cathédrale, quand un pauvre sans vêtements s’approcha de lui. Saint Martin donna l’ordre à son diacre de couvrir le pauvre; mais comme ce dernier tardait à obéir, saint Martin prit sa propre chape et la donna au malheureux. Ce même jour, pendant la messe, au moment de la consécration de l’hostie, un globe de feu apparut sur la tête du prélat, au grand étonnement de tous ceux qui furent témoins de ce prodige. Un autre jour, le fils d’une pauvre veuve venait d’expirer; Saint Martin, à force de prières, le ressuscita et le rendit à sa mère inconsolable. Il sauva aussi l’esclave favori d’un proconsul qui était possédé par un esprit immonde; il accomplit encore un grand nombre de belles actions qui lui valurent le respect et l’admiration de tous ceux qui le visitaient. Le diable, qui fut l’ennemi particulier de saint Martin, le détestait principalement à cause de son excessive charité. Un jour il se moquait du saint évêque, en lui reprochant d’accorder ses faveurs à des coupables à peine repentants; mais Saint Martin lui répondit aussitôt : « Misérable que tu es, si tu voulais cesser de persécuter le genre humain, et te repentir aussi, peut-être trouverais-tu merci et l’oubli de tes fautes dans l’inépuisable bonté de Jésus-Christ. » Ce qui distinguait surtout saint Martin c’était sa douceur, sou inaltérable sérénité. Jamais on ne le vit en colère, jamais triste, jamais gai. Il fut très honoré par l’empereur Valentinien et par l’impératrice, et aussi par Maxime. Après une longue existence consacrée à la prière, au renoncement de soi-même, à une charité des plus actives, il mourut vers l’année 377.
Les figures séparées de saint Martin ne sont pas communes ; on le représente avec l’habit des soldais romains, ou bien, ce qui est plus fréquent, avec la mitre et la chape des évêques, sans aucun attribut qui le distingue. Le sujet fameux connu sous le nom de la Charité de Saint Martin divisant son manteau, a inspiré plusieurs tableaux célèbres. J’en signalerai deux comme des contrastes remarquables de composition et de style. Chacun connaît celui de Van Dyck. dans la galerie de Windsor; Saint Martin a une belle figure, brillante de jeunesse, de grâce et de bonté; il porte un chapeau à plumes, est monté sur un cheval blanc, et se retourne pour couper avec son épée un riche manteau d’écarlate qu’il partage avec un mendiant sale et déguenillé. Une sorte de bohémienne, avec des cheveux noirs qui flottent au vent, élève son enfant en l’air pour demander la bénédiction du Saint. On dit que Van Dyck s’est représenté lui-même avec son cheval favori. Cette peinture respire la vie; elle est puissante, dramatique, pleine d’expression. Combien est différent, combien est supérieur de vérité et de sentiment un tableau de Carloto placé au-dessus d’un autel de l’église Sainte-Anastasie, à Vérone !
Le Saint en costume militaire, mais la tête nue, se penche avec un air de compassion vers le pauvre dépouillé, dont il a déjà couvert une partie du corps avec son manteau qu’il se prépare à diviser. Rien ne ressemble ici à la composition brillante de Van Dyck, mais l’expression du Saint est si calme, si naturelle; il y a dans sa contenance humble et charitable un contraste si marqué avec l’air martial du soldat, qu’il est impossible de ne pas reconnaître combien le peintre a été pénétré de la grandeur et du véritable esprit de la légende, ainsi que du caractère de Saint Martin, il existe aussi sur le même sujet une petite gravure en bois d’Albert Durer, où il n’y a que deux figures, mais elles sont pleines d’expression.
Les autres scènes de la vie de Saint Martin sont moins propices à la peinture. Le miracle du globe de feu, appelé «la Messe de saint Martin», a été peint par Lesueur, pour l’abbaye de Marmoutier. Cette composition n’a pas moins de quinze figures. Saint Martin est debout devant l’autel; il est représenté avec une petite taille, un corps frêle mais un visage plein d’une divine expression. La surprise de ceux qui l’entourent, particulièrement d’un prêtre et d’une femme à genoux, est exprimée d’une manière admirable, parfaitement en harmonie avec la sainteté de la scène et du lieu. Ce tableau fait actuellement partie du musée du Louvre. Saint Martin ressuscitant un enfant mort, par Lazarro Baldi, se trouve dans la galerie de Venise. L’Esclave du proconsul délivré a été traité par Jordaens, dans une composition imparfaite mais pleine de mouvement. Saint Martin est en costume d’évêque, le possédé est à ses pieds. Son maître, accompagné de ses soldats, est derrière, attendant l’effet du miracle.
Parmi les histoires sans nombre relatives à saint Martin, il y en a une que je veux citer ici comme un admirable sujet de tableau, et qui n’a pas, que je sache, été encore mise en scène. L’empereur invita le saint évêque à un repas ; dans le but de lui faire honneur, il lui présenta sa coupe pleine de vin, pour que, suivant l’usage, il y trempât ses lèvres avant de la lui rendre. Mais, à l’étonnement de tous les convives, saint Martin offrit aussi la coupe à un pauvre prêtre qui était assis près de lui. Il voulait montrer par là qu’il estimait le dernier des serviteurs de Dieu à l’égal du plus grand monarque de l’univers. C’est pour cela que saint Martin a été choisi pour patron des buveurs et des joyeux repas. Sa fête, qui a lieu, comme on le sait, le 11 novembre, et qu’on appelait la Saint-Martin, était l’occasion d’excès de tout genre, de réjouissances de toute nature, dans le genre de celles du carnaval. (Revue britannique, publ. par Saulnier fils et P. Dondey-Dupré, publié par Sébastien Louis Saulnier, 1846.)
Sur le même sujet:
- Sauvons l’église d’Attainville
- La statue de Saint Martin d’Attainville , Le Parisien
- Le nucléaire va sauver la statue d’Attainville, le Parisien
- Le retour de la statue, le Parisien
- Tombeau reconstitué de saint Martin de Tours, dans la crypte de la basilique
Sources des images:
- Église de Saint Martin d’Attainville: Par P.poschadel — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, image
- Statue de Saint Martin, contribution de Guy Le Ray
- Tableau de Van Dyck :commons.wikimedia.org et royalcollection.org
- Gravure en bois de Saint Martin: wikiart.org
- Tombeau de Saint Martin à Tours: par Tipoune — Travail personnel. Sous licence Domaine public via Wikimedia Commons