En fouillant dans son cœur et dans sa conscience,
Un vieux Loup y trouva tant d’horribles forfaits,
Qu’il voulut, par le jeûne et par la pénitence,
Racheter tous ses vieux méfaits.
« Je veux, dit l’animal goutteux et cacochyme,
A commencer du jour de la Quadragésime,
Forcer mon naturel glouton
A ne plus manger de mouton ;
Passer mes nuits dans la prière,
Observer tous les Quatre-Temps. »
Il mena tout d’abord une vie exemplaire;
Mais voilà, par malheur, qu’au bout de quelque temps
L’animal avisa, jouant dans la prairie,
Une jeune brebis, bien grasse, bien nourrie.
Elle était destinée à la table d’un dieu !
« Hum! se dit l’animal, si je n’avais fait vœu
De pénitence Et d’abstinence…
Fi! chassons ce mauvais désir.
Cependant, à la voir si fraîche et rondelette,
Si rebondie et grassouillette,
Je me figure le plaisir…
Fil… les délices!… fi!… fi!… plutôt que j’assume
Sur ma tête… Une fois, dit-on, n’est pas coutume;
Oui, celle fois encor, cette fois seulement !
Je jure à l’avenir de vivre saintement,
De me comporter comme un ange. »
Cela dit, maître Loup et la tue et la mange.
Ceci s’adresse à bien des gens.
Très souvent voilà comme
Ils jurent de dompter tous leurs mauvais penchants
Et de dépouiller le vieil homme.
La moindre occasion leur fait oublier tout :
C’est la conversion du Loup.
“La conversion du Loup”