À la croix de Berny, si j’en ai souvenance,
Aux premiers jours de mai, suivant l’accoutumance,
Pour la course au clocher fut donné rendez-vous,
Je pourrais dire aux cerfs, aux biches, aux gazelles,
Laissant là ces vieilles ficelles,
Du moment qu’il s’agit de fous,
A l’humanité je m’adresse,
Des fous !… il en vint de partout.
La course au clocher est du goût
De ces gens désireux de montrer leur adresse,
Ainsi que la souplesse
De leurs chevaux pur-sang, au jeu de casse-cou.
La lice est ouverte : on assigne
Leur rang aux concurrents, Friedland et Bijou,
Larirette, Enfer, Acajou
Vont chacun se placer en ligne.
Le signal est donné, l’on part.
Dans cette course échevelée,
On les suit longtemps du regard.
Tout marche bien dans la vallée.
Viennent les monts et les ravins,
Maint coursier demeure en arrière ;
Tel autre se casse les reins,
Celui-ci tombe en la rivière.
Au but, de plus de vingt rivaux,
Un seul put arriver dispos.
Il dut le prix à la prudence
Du Maître qui d’avance,
Prit soin de tout prévoir et de tout calculer :
Ne rencontrant aucun obstacle,
Qui put le faire reculer,
Ce n’est donc pas si grand miracle,
Si notre vigoureux coursier
Au but arriva le premier.
Faut-il choisir une carrière,
N’abandonnons rien au hasard :
C’est souvent du point du départ
Que dépend une vie entière…
“La Course au Clocher”