Charles-Guillaume Sourdille de la Valette
Écrivain, poète et fabuliste XVIIIº – La diligence
Sur une route, au pied d’une montagne.
D’écoliers un essaim nombreux.
Loin du maître, et partant heureux.
S’émancipait dans la campagne.
Au même endroit, d’un pas pénible et lent,
Six chevaux haletants traînaient la Diligence.
La côte était rapide et le soleil brûlant :
L’œil à peine aperçoit si le lourd char avance.
Un des marmots propose d’arrêter
Cette masse presque immobile ;
On applaudit sans hésiter.
Tant la chose parait facile :
En effet, chacun peut aller,
Sans être vu, se cramponner derrière,
Et tirer le char de manière
A le faire dégringoler.
Enfin la bande à folle tête
S’accroche à la voiture et lire à qui mieux mieux.
Ils se disaient, déjà tout glorieux :
« Ferme, tenons ! la voilà qui s’arrête. »
Or, ils ne la retardaient pas
D’un pas.
Malgré leurs efforts et leur peine
On arrive au sommet; le fouet claque, et soudain
L’attelage au grand trot s’élance dans la plaine.
Ceux qui n’ont pas lâché la main
Tombent le nez dans la poussière :
On crie, on court ; mais c’est en vain.
Et le char poursuit sa carrière.
Ce char, c’est le char de l’État :
Pour l’arrêter dans sa route nouvelle
En vain s’agite et se défait
L’ignorance avec sa séquelle :
De son heureux voyage il poursuivra le cours,
Et, dans sa marche sûre et prompte.
Il laissera couverts de honte
Nos politiques à rebours.
Charles-Guillaume Sourdille de la Valette