Un jour la Beauté vaine & fière .
Reçut avis que la Douceur
Lui disputoit l’honneur de plaire,
Et le don de parier au cœur.
-*
Quoi! dit-elle, cette sucrée
S’arroge avec témérité
La palme qui fut consacrée
Dans tous les temps à la Beauté !
Soudain, jalouse & furieuse,
Elle porta sa plainte aux Cieux :
L’affaire devint sérieuse;
On la plaida devant les Dieux.
Auprès du tribunal céleste,
La Beauté fit un grand éclat ;
Un doux langage, un air modesle,
De l’autre furent l’avocat.
Le Destin, leur juge & leur maître,
Tout entendu , trois fois toussa ;
Puis son bon sens se fit connoître
Par cet arrêt qu’il prononça:
Sans vous deux l’Amour ne peut être;
Ses jours seroient mal assurés.
Vous, Beauté, vous le ferez naître;
Vous, Douceur, vous le nourrirez.
“La Douceur et la Beauté”