Fable imitée de l’Allemand.
Au bonhomme immortel, l’Esope de nos jours.
L’âne , la larme a l’œil, adressait ce discours :
Pourquoi me faites-vous l’injure
De me priver , dans vos écrits ,
Du plus beau des présens que m’ait faits la nature?
Je n’ai pas mérité cet injuste mépris.
Grâce à votre fausse peinture ,
Les aveugles humains, trompés par l’imposture ,
Fuyant de mon esprit les charmes délicats,
Ne me recherchent, les ingrats !
Que pour leur servir de monture,
Cessez de me cacher sous un voile trompeur.
Que la pure raison , que l’enjoûment flatteur
Viennent sous votre plume embellir mon langage :
Que les hommes en moi reconnaissent un sage ,
Et rougissent de leur erreur ».
— Ami , je te plains fort » , reprit le fabuliste ;
” Mais si ton plan s’exécutait ,
Tu deviendrais le moraliste ,
Et moi, je serais le baudet. ”
“La Fontaine justifiée”