Sur un ormeau d’une belle venue
Une vigne était épandue ;
Le spectacle en était intéressant et beau ;
Elle se mariait presqu’à chaque branchage.
Mais, commère, lui dit l’ormeau,
En couvrant ainsi mon corsage,
Vous m’intercepterez et l’air et le soleil.
De me nuire il ne serait pas sage,
Notre intérêt entre nous est pareil.
Cher hôte, lui répond la vigne,
Vous nuire ! Le trait serait par trop indigne,
N’êtes-vous pas mon protecteur ?
Ah ! mes embrassements sont ceux du mariage !
Et, contre le soleil et sa trop grande ardeur,
Les vents impétueux et les coups de l’orage,
C’est pour vous protéger. Elle fit davantage.
Lorsqu’enfin le temps fut venu
Que notre ormeau pouvait être abattu,
Le maître dit : je ne puis me résoudre
A rompre un aussi bel accord.
Quelle aimable union ! Je ne veux la dissoudre.
L’orme ainsi ne mourut que de sa belle mort.
“La Vigne et l’Ormeau”