Cest une terrible entreprise
Que de vouloir convaincre un sot de sa sottise.
L’Ane d’un jardinier un beau jour cheminait
Chargé de litière puante ,
Et tout le inonde le fuyait.
Bon ! bon ! disait maître baudet,
Ma figure en impose à la tourbe insolente !
Elle se sauve à mon aspect,
Et les accens de ma voix éclatante,
A qui ne me voit pas, inspirent du respect ! —
Le lendemain il revient à la ville ,
Le dos couvert de pots de fleurs,
Et chacun attiré par les bonnes odeurs,
S’empresse autour de lui. Voilà mon inbécille
Qui s’imagine bêtement
Que, de ses attraits rafolant,
Tout le monde vient à la file
Pour le voir, l’admirer, lui faire compliment;
Que l’amour-propre a d’industrie
Pour tourner tout à son profit !
Fuyez un sot : c’est par envie !
Abordez-le : vraiment ! c’est qu’il a de l’esprit !
“L’Ane et le Jardinier”
- Antoine Vitallis 1749-1???