Un enfant regardait son père
Frapper le tronc d’un arbre à l’écorce légère.
A chaque coup retentissant
Qui faisait à la tige une large blessure,
Une gomme odorante et pure
S’échappait du tronc gémissant,
Comme des larmes ou du sang.
La plaine en était embaumée,
Et la main même qui frappait
La pauvre tige désarmée,
Par cette sève qui tombait
Était doucement parfumée.
« Mon père, s’écria l’enfant,
Pourquoi d’une main si cruelle
Frappez-vous cet arbre innocent ?
Ne pourriez-vous donc autrement
Avoir cette liqueur qu’en son sein il recèle ? »
— « Mon fils, lui répondit le père en soupirant.
Cette sève si parfumée
Dans la tige à jamais dormirait enfermée,
Si je ne frappais jusqu’au cœur
Le pauvre tronc où gît l’odorante liqueur.
Ainsi l’a décidé l’auteur de la nature :
Tout baume vient dune blessure,
Blessure du pauvre arbre attaqué par le fer,
Ou blessure du cœur par le malheur ouvert,
Pour savoir consoler, il faut avoir souffert. »
“L’Arbre qui produit le Baume”