Sur le bord d’un étang, très-content de lui-même,
S’écrioit un Canard d’une arrogance extrême :
Dans toute la nature est-il un animal
Qu’on puisse m’égaler? non , je n’ai point d’égal.
Seul j’ai reçu tous les dons en partage ;
Je possède mille attributs divers;
Je marche et fends les airs,
Et puis, quand il me plait, je nage….
Il eût continué ; mais un rusé Serpent,
Ennuyé de sa gasconnade,
S’approchant, lui dit : camarade,
Tout beau; ne vous vantez pas tant.
Le Daim court mieux que vous ; le Rouget, à la nage,
Auroit aussi sur vous de l’avantage ;
Et quant à voler, le Faucon
Pourroit bien vous donner leçon.
Ainsi sachez, soit dit sans vous déplaire,
Vous , qui vous croyez sans égal,
Qu’il vaut beaucoup mieux savoir faire
Bien une chose , que cent mal.
“Le Canard et le Serpent”
Ceux qui donnent les meilleurs avis ne sont pas toujours les plus sages. J’aurois dû profiter moi – même de la leçon du Serpent.
- Jean-Espérance-Blandine de Laurencin – 1733 – 1812