Un chasseur revenant la gibecière pleine
Avise au seuil de la maison
Un sien voisin, et d’un ton fanfaron :
Voyez, dit-il, la bonne aubaine !
Ne suis-je pas le roi des chasseurs du canton ?
Chaque fois que je sors, soit au bois, soit en plaine,
Je rapporte au logis les lièvres par douzaine. »
Tandis qu’il vante ses exploits
De toute l’ampleur de sa voix,
Son chien timidement s’approche et lui dit : » Maître,
Je serais bien heureux de vous voir reconnaître
La part qui me revient dans ces faits éclatants,
Car enfin la plupart du temps,
Je vous le dis tout bas pour ne pas vous déplaire,
Ces lièvres, ces lapins, c’est moi qui les ai pris. »
Ainsi parla le chien. Le chasseur en colère
Lui lançant un regard de souverain mépris.
D’un geste impérieux l’envoya dans sa loge
Et poursuivit son propre éloge.
Que nous enseigne ce récit ?
Maint auteur de nos jours traite ainsi les manœuvres
Dont il s’est entouré pour compiler ses œuvres,
Et s’adjuge à lui seul l’honneur et le profit
D’un livre qu’il n’a point écrit.
“Le Chasseur et son Chien”