Jean-Stanislas Andrieux
Avocat, poète et fabuliste XVIII° – Le Chat, la vieille Souris et la Jeune
LE CHAT.
Approche ton minois charmant ;
Viens ! mon ange , que je te baise;
Oh ! que je t’aime tendrement !
Que puis-je t’offrir qui te plaise ?
LA VIEILLE SOURIS.
Fuis, mon enfant, fuis ce trompeur ;
Échappe aux pièges qu’il sait tendre.
LA JEUNE SOURIS.
Maman , il ne me fait pas peur:
Son œil est doux, sa voix est tendre.
LE CHAT.
Viens goûter ce sucre et ces noix,
Gages de mon amour extrême.
LA VIEILLE SOURIS.
Fuis , te dis-je encore une fois.
LA JEUNE SOURIS.
Et pourquoi donc le fuir ? Il m’aime.
LE CHAT.
Viens ; rien ne doit l’intimider;
D’un tendre ami que peux-tu craindre?
LA VIEILLE SOURIS.
L’hypocrite ! comme il sait feindre !
LA JEUNE SOURIS.
Hélas ! à quoi me décider ?
LA VIEILLE SOURIS.
Que dis tu ? tremble , malheureuse ,
Si vers lui tu fais un seul pas.
LE CHAT,
Laisse dire cette grondeuse ,
Mon amour, et viens dans mes bras.
LA JEUNE SOURIS.
M’y voilà !… dieux !…. je suis perdue !
O le monstre !…. O la trahison …..
Ah ! je sens la griffe !…. il me tue…..
Ah ! maman!… vous aviez raison !….
Les conseils ne profitent guère
Lorsqu’ils combattent le penchant :
Jeune fille écoute un amant
Malgré les leçons de sa mère.
D’abord, craignant de trop risquer ,
Elle s’arrête…. elle balance….
Puis s’enhardit… et puis s’avance…
L’amant finit par la croquer.
“Le Chat, la vieille Souris et la Jeune”
François Andrieux – 1759 – 1833