Déjà jusqu’au sommet j’ai gravi la colline,
Et voici devant moi le côté qui décline.
Doux soleils du printemps, bois sombres, frais ruisseaux,
Grands arbres du chemin tout pleins de nids d’oiseaux,
Souffles capricieux dont les tièdes haleines
Courbaient et relevaient les blonds épis des plaines,
Moelleux tapis des prés, beaux fruits, brillantes fleurs,
Flots murmurants, rayons, chants, parfums et couleurs,
Mes yeux indifférents et mon âme distraite,
Dans les sentiers nouveaux qu’à fouler je m’apprête,
Ne vont-ils plus sur vous s’arrêter désormais ?
Deviendrai-je infidèle à tout ce que j’aimais ?
Vais-je enfin t’adorer, veau-d’or, toi que naguère
Je méprisais, dieu vil des natures vulgaires ?
Non, non, gardez pour moi votre charme vainqueur,
Beautés de la nature et sentiments du cœur :
Qu’à l’aspect d’une fleur, d’un enfant, d’une femme,
Toujours un chant de joie éclate dans mon âme ;
Près du pauvre blessé, gisant dans le chemin,
Que je ne passe pas sans lui tendre la main ;
Que le rayon divin de ta lampe, ô Sagesse,
Éclaire doucement le soir de ma vieillesse ;
Puissé-je enfin, gardant ma foi jusqu’au tombeau,
Croire toujours au bien, croire toujours au beau !
“Le Déclin de la Vie”