Charles-Guillaume Sourdille de la Valette
Écrivain, poète et fabuliste XVIIIº – Le jeune lapin et le renard
Un lapin, dans cet âge heureux
Qui ne connaît soucis ni peine,
Folâtrait près de sa garenne.
Un ami cependant faisait faute à ses jeux :
Il n’est de vrai plaisir qu’à deux.
Tout-à-coup s’offrit a sa vue
Un animal d’une espère Inconnue ;
C’était maître renard, qui lui dit : « Mon cousin »
Puisqu’un heureux hasard aujourd’hui nous rassemble,
» Embrassons-nous, jouons ensemble :
» J’ai toujours aimé le lapin ;
» Le lapin ! oh ! oui, je le prise
» Seul plus que tous les animaux ;
» J’en fais serment. J’ai des défauts,
» Mais ma vertu, c’est la franchise. »
Ces mots ont du lapin décidé le refus ;
Il s’enfuit au terrier, et là, par sa fenêtre :
» Toi, franc !… je le croyais peut-être ;
» Te l’as dit, je ne le crois plu !
La vertu de parade à bon droit épouvante .
Fait-elle un pas vers moi, je recule d’un pas.
Les qualités dont on se vante
Sont toujours celles qu’on n’a pas.
Charles-Guillaume Sourdille de la Valette, Le jeune lapin et le renard