Un Loup poursuivait un Chevreau
Il l’atteignit, et notre larronneau
Allait mettre en quartiers sa victime innocente ,
Quand le pauvret, d’une voix suppliante.
Dit avec respect : Monseigneur,
Y songez-vous ? Suis-je fait pour l’honneur
D’assouvir de votre Excellence
L’indomptable appétit ? Quoi ! votre noble panse
Pourrait engloutir un chevreau,
Le plus maigre de son troupeau!
A quatre pas d’ici, près de cette garène,
J’ai vu Dom Sanglier; il fait la méridienne :
Il doit être fort bon; car il est gras à lard.
Que ne l’attaquez-vous ? Oh ! dit le papelard ,
C’est qu’avec ce grivois il me faudrait découdre,
Et moi j’aime la paix ; il faut donc te résoudre
A mourir. — Vil brigand ! j’éviterais la mort,
Si vous étiez plus brave, ou si j’étais plus fort.
“Le Loup et le Chevreau”
- Alexandre Coupé de Saint-Donat- 1775-1845