Jean Baptiste François Ernest Chatelain
Nous presser trop n’est pas servir nos intérêts :
J’ai pour penser ainsi vingt exemples tout prêts.
Un fait dont le détail revient à ma mémoire
Me suffira : voici l’histoire.
Sur son lit de douleur un vieillard étendu
Faisait une triste figure ;
Les siens s’enquérant pour sa cure,
Par Saint Côme il fut répondu
Qu’au Malade il fallait tranquillité parfaite.
Faute de quoi, le hère sans trompette
Décampait pour le Paradis.
Bientôt de cet arrêt est instruit le Notaire,
Le vent en vient au presbytère ;
Soudain l’un songe au test, l’autre au de profundis;
Et de courir au logis du Malade
De lui crier, l’un, ” Soyez bon parent
Ne mourrez pas, monsieur, sans faire testament ; ”
L’autre de répéter cette capucinade :
” Pour vos péchés, mon fils, quelques messes fondez.
Et quelques biens au clergé concédez,
Le diable sera fin, après ce, s’il vous happe ! ”
Ils firent tant, qu’en dépit d’Esculape
Le patient fermant les yeux,
S’en fut rejoindre ses aïeux.
Ses hoirs, gens avisés, de qui je tiens l’histoire,
L’enterrèrent sans pompe en un lieu de leur choix,
Narguant Thémis et son grimoire.
Ainsi nos conseillers durent pour cette fois,
Fermer l’un son missel l’autre son écritoire.
“Le Malade, le Notaire et le Curé”