Un merle échappé de sa cage
Revint à tire-d’aile habiter le bocage,
Et répétant à tout propos
Ce qu’il avoit appris pendant son esclavage ;
Il ennuyoit par fois un grand nombre d’oiseaux.
Se croyant plus d’esprit, en babillant sans cesse :
Moi, disoit-il un jour, j’amuse, j’intéresse
Par mon joli langage et mes contes nouveaux.
Est-on plus ignorant que pinsons et moineaux ?
Les rossignols et les Fauvettes
Ne disent que des chansonnettes,
Où l’on ne comprend rien, d’ailleurs pas un seul mot ;
El la dolente tourterelle…
Il commençoit ainsi sa longue kyrielle :
Tout oiseau peu parleur n’alloit être qu’un sot ;
Mais une savante hirondelle
Lui rabattit le caquet tout à coup :
Croyez-moi, mon ami, j’ai parcouru le monde ;
Presque partout, sur la machine ronde,
Qui pense peu, parle beaucoup.
“Le Merle et l’Hirondelle”
- La Marquise de la Ferrandière, 1736 – 1819