Dans leur demeure souterraine,
Le mulot et la taupe étaient proches voisins :
C’était là que chacun faisait ses magasins.
Que ma maison toujours de mes amis soit pleine,
Disait seigneur mulot ; je veux mener grand train ;
Point de dîner chez moi sans y faire bombance.
Or, tout se dévorait, et les fruits et le grain.
La taupe vivait bien, mais sans trop de dépense.
De leur conduite enfin voici le résultat :
Le mulot mangea tout ; de la taupe, au contraire,
Les affaires étaient dans le meilleur état.
Un soir que le mulot déplorait sa misère,
Et s’écriait : Ah ! quelle maigre chère !
Je n’ai pour mon souper que le quart d’une noix.
La taupe alors dut entendre sa voix,
Et dit : Je savais bien qu’il faudrait en rabattre ;
Si dans maints dîners copieux
Tu n’avais pas mangé pour quatre,
A présent, mon ami, tu pourrais souper mieux.
“Le Mulot et la Taupe”
- Jean-Auguste Boyer-Nioche, 1788-1859