Dans une basse-cour bien peuplée de canards, poules, dindons et autres animaux, deux nouveaux commensaux furent introduits, un paon au beau plumage, et si fier de cette beauté qu’il se croyait le premier personnage du monde, et une pintade, volaille modeste et tout-à-fait populaire. Les nouveaux venus dans une basse-cour sont comme deux hommes nouvellement introduits dans une société ; chacun les examine et cherche à deviner ce qu’ils sont et ce qu’ils valent. Autant en fit-on à nos deux volailles. Le paon entretenait ses commensaux du mérite de son plumage et de plusieurs autres qualités qu’il croyait avoir à cause de celle-là. La pintade, au contraire, ne parlait jamais d’elle, et vivait modestement et familièrement avec tout le monde. Qu’arrivât-il ? Cette dernière fut traitée comme une amie d’ancienne date. On lui reconnut des qualités, une bonne tournure, de la légèreté dans le vol, et surtout une douceur et une modestie qui plaisaient à tout le monde. Quant au paon, fatigué de son orgueil, chacun le laissa de côté, après avoir observé tous les défauts qu’il pouvait avoir, la largeur de son pied, la dureté de sa voix et le sot orgueil de son caractère.
“Le Paon et la Pintade”