Un perroquet, animal très-railleur, et un petit carlin, fort bonne personne, avaient un commun maître. Souvent seuls au logis, ils passaient leur temps à regarder par la fenêtre ce qui se faisait dans la rue ; et là le perroquet ne manquait pas de donner un coup de langue contre tous les animaux qu’il voyait. La brebis avait l’air stupide ; l’âne portait des oreilles trop longues ; le cheval était trop orgueilleux ; le bœuf lourd ; l’homme… l’homme lui-même était l’objet de ses critiques.
Le carlin lui dit enfin un jour, à la suite d’une revue de ce genre : « Mon cher perroquet, je vous dis ceci, parce que je vous aime : pourquoi n’avez-vous aperçu que des défauts dans les animaux que vous avez vus ? Ils ne manquent cependant pas de qualités : la brebis est bonne ; l’âne laborieux ; le cheval léger, vaillant, et a des formes superbes ; le bœuf est fort et docile ; les autres animaux ne sont pas non plus dépourvus de mérite ; et cependant vous n’en avez point parlé. Vous leur trouvez des défauts à tous, parce que personne n’en est exempt ; mais cette tournure d’esprit est odieuse à tout le monde ; tout le monde la craint. Si vous cherchiez dans les animaux des qualités, et vous en trouveriez également, vous seriez bien plus aimable ; et cette occupation vous profiterait davantage. »
“Le Perroquet et le Carlin”