Ferdinand Canu
Médecin, poète et fabuliste XVIIIº – Le poète et le musicien
Un Musicien, un Poète,
Se disputaient à qui mieux mieux ;
Chacun croyait prouver, en criant à tue-tête,
Que l’art qu’il cultivait était plus glorieux
Que celui de son adversaire.
Certes, ils ne manquaient pas tous deux
De beaux raisonnements d’arguments spécieux :
Gens qui plaident n’en manquent guère.
Peut-être à disputer on les verrait encor,
S’ils n’avaient consenti, pour les mettre d’accord,
Qu’on fît choix d’un arbitre.
Apollon fut nommé. Quel autre, à juste titre,
Pouvait plus qu’Apollon être ici compétent,
Lui leur patron ? « Cessez, dit-il, ce différent ;
Sur un pareil sujet discuter, c’est folie.
Chacun de vous à tort s’attaque et s’humilie.
Orateur, philosophe, auteur, musicien,
Tous ces titres divers sont égaux au Parnasse ;
Mais ce n’est qu’au talent que j’y marque une place.
Tel qui se croit poète, au Parnasse n’est rien.
Voulez-vous aspirer à cette préférence ?
Dans vos prétentions, Messieurs, n’oubliez pas
Que le mérite seul fait la prééminence,
Et que, par lui, la gloire est de tous les états. »
Ferdinand Canu