Avant de me quitter pour agir par toi-même,
Disait un vieux renard à l’un de ses petits,
Reçois encor quelques avis De ton père qui t’aime.
Il faut ici-bas, mon enfant,
Se montrer souple, insinuant;
Toujours employer la finesse,
Chacun voulant user d’adresse ;
Et puis se faire bien souvent
Tout autre que l’on est, et tourner à tout vent.
Je dois également te dire
Qu’il faut savoir à temps pleurnicher ou sourire ;
Car malheureusement à la ville, à la cour,
L’art de dissimuler est à l’ordre du jour.
En un mot, mon enfant, ce qu’on nomme franchise
Veut dire, parmi nous : légèreté, sottise.—
— Vous me faites, mon père, un singulier tableau
De ce monde enchanteur que je trouve si beau.
— Enchanteur ! ah ! vraiment l’épithète est charmante,
Elle est juste surtout..,. ta candeur m’épouvante.
Tu crois que j’exagère.. oh ! non.
Va, plus tard tu diras : Mon père avait raison,
Quand il me répétait: Mon cher fils, dans le monde,
Il faut, pour réussir, une adresse profonde.
Et bien savoir par-dessus tout
Ménager la chèvre et le chou.
“Le Renard et son Fils