Le rosier est assez modeste ;
Pourtant on l’a vu quelquefois
S’enivrer du poison funeste
Qu’on offre si souvent aux rois :
Je veux parler de la louange.
De sa part c’est assez étrange.
— Voyons! que pensez-vous de moi?
Disait le rosier à la ronce. —
— J’en pense un très grand bien, ma foi. —
Ce fut là toute la réponse.
— Mais enfin, qu’aimez-vous le mieux,
Des mérites que j’ai : ce qui charme les yeux,
Ou bien mon odeur enivrante? —
— Je suis rustique, je m’en vante,
Et des moins flatteurs aujourd’hui. —
— N’importe. —Eh bien! avant tout j’aime….
Vos épines. Pardon de ma franchise extrême.—
Ce qu’on exalte chez autrui,
Ce sont les qualités qu’on croit avoir soi-même.
“Le Rosier et la Ronce”
- Alexis Rousset , 1799 – 1885