La peur est une étrange chose ;
Le nombre est infini des malheurs qu’elle cause,
Et quoiqu’il ne s’agisse ici que d’un pinson,
Cette fable aux humains peut servir de leçon.
Dans un vallon malsain, écarté, solitaire,
Sur une pierre plate exposée au soleil,
Un reptile étendant son corps souple et vermeil,
Humait le feu caniculaire.
Et toutefois le féroce animal
En ce moment ne songeait point à mal ;
Il digérait son repas de la veille.
En face un malheureux pinson,
Las d’avoir aux échos répété sa chanson,
Dormait paisiblement sur un arbre : il s’éveille
Et par un funeste hasard
Son regard du serpent rencontre le regard ;
Il se trouble, il frémit, tremble et perdant la tête
Dans la gueule du monstre en la fuyant se jette.
Triste et honteuse mort où la peur seule a part.
“Le Serpent et le Pinson”