Salut, dit un voleur, profonde obscurité !
Je puis faire mon coup avec sécurité ;
Car, dans la ville,
Tout est tranquille,
Et l’horloge a sonné minuit.
Il dit, chemine à petit bruit;
Il grimpe sur un mur ; voyez-le se suspendre
Du côté d’une cour ; il est près d’y descendre;
Mais un chien fidèle,
Faisant sentinelle,
L’entend, accourt, et se met à japper.
Notre voleur est prompt à regrimper.
Vainement ce nouveau Cartouche
Adoucit, contrefait sa voix :
Viens, mon toutou. Rien ne le touche :
Ses jappemens redoublent cette fois.
On lui jette du pain ; infructueuse peine !
En vrai Cerbère, il se démène ;
Pour le voleur point de répit ;
Si bien qu’enfin il déguerpit.
Mais voyons ce qu’au chien gardait la destinée.
Du lever du bourgeois déjà l’heure est sonnée ;
Il vient, siffle Pluton : va-t-il le caresser ?
Non pas, il l’appelait exprès pour le rosser.
Durant toute la nuit japper à tête fendre,
Et troubler mon sommeil ! cela vaut du bâton.
Hélas ! si j’aboyais, dit le pauvre Pluton,
C’était pour te défendre.
“Le Voleur, le Chien et son Maître”
- Jean-Auguste Boyer-Nioche, 1788-1859