Un hibou, enflé d’orgueil et de vanité, répétait ses cris lugubres, à minuit, du creux d’un vieux chêne. D’où provient, dit-il, ce silence qui règne dans ce bois, si ce n’est pour favoriser ma mélodie ? Sûrement les bocages sont charmés de ma voix ; et quand je chante, toute la nature écoute. Un écho répète dans le même instant, — Toute la nature écoute. Le rossignol, continua le hibou, a usurpé mon droit : son ramage est musical, il est vrai ; mais le mien est beaucoup plus doux. L’écho répète encore, — Est beaucoup plus doux. Excité par ce fantôme, le hibou, au lever du soleil, mêla ses cris lugubres à l’harmonie des autres oiseaux ; mais, dégoûtés de l’entendre, ils le chassèrent unanimement de leur société, et continuent encore à le poursuivre partout où il paraît : de sorte que pour se mettre à l’abri de leurs poursuites, il fuit la lumière, et se plaît dans les ténèbres.
Les hommes vains et orgueilleux se figurent que leurs perfections imaginaires sont le sujet de l’admiration des autres, et que leurs propres flatteries sont la voix de la renommée.
“L’Écho et le Hibou”