Compère le renard, en rôdant par la plaine.
Vit un jeune écureuil qui prenait ses ébats,
Sautant de branche eu branche à la cime d’un chêne
C’était l’occasion de faire un bon repas ;
Mais atteindre là-haut, renard ne le peut pas.
De l’aventure de la treille
Il lui souvient toujours. Or il dit à part soi :
Cet animal est fin, éveillé comme moi,
Et notre queue est à peu près pareille ;
Mettons donc à profit cet air de parente.
Pour l’attirer de mon côté.
Ah, cher cousin ! s’écrie alors le traître, »
Depuis tantôt mille ans j’aspire à vous connaître ;
On m’a dit tant de bien de vous !
Eu effet, où trouvée un parent plus aimable ?
0 combien il me serait doux
De vous voir partager les plaisirs de ma table!
J’ai des fruits de toute saison,
Force amandes surtout, et des noix à foison.
— Grand merci ! lui répondit l’autre.
Je suis flatté d’un si galant accueil ;
Mais qui donc êtes-vous, et quel nom est le vôtre ?
— Mon nom ? je m’appelle écureuil.
Et de plus écureuil fort à votre service.
Feu votre père (hélas ! que le ciel le bénisse ! )
Était propre frère du mien :
Jugez de notre étroit lignage.
Par le plus doux baiser serrons donc le lien
Qu’établit entre nous cet heureux cousinage. »
L’autre, à ces mots, ne fait qu’un saut,
Mais c’est pour remonter plus haut.
« Quoi ! vous vous éloignez ? dit le rusé compère.
— Oui, mon très-honoré cousin ;
Et voici le conseil, s’il faut le dire enfin,
Que m’a donné cent fois votre tante, ma mère :
« Mon fils, entre parents qui se touchent de près
S’élève toujours quelque noise :
Veux-tu donc avec eux n’avoir aucun procès.
« Ne t’en laisse aborder que de plus d’une toise ;
C’est le moyen de vivre en paix. »
“L’Ecureuil et le renard”