Dans un réduit obscur, enfermé tristement,
Un élève indocile, et tel que j’en vois tant,
Seul avec son Tacite, Homère et La Fontaine,
Certain jour de plaisir, expiait sa semaine.
On était en avril, et cet heureux congé,
Après un long hiver, s’offrait plein d’espérance ;
L’air doux et le ciel pur : tout semblait ménagé
Pour accroître l’ennui du lieu de pénitence.
Le jeune prisonnier d’abord à sa douleur
Se livre, et de ses pleurs baigne un instant sa place;…
Puis un morne silence ; . . . ensuite une fureur :
Il trépigne ; il menace ;
Il déchire, il maudit les trésors du Parnasse ;
Il les frappe du pied :
« Mais c’est contre loi seul, écolier sans courage,
Et, dans ta prison même, indigne de pitié,
Qu’il te faut, dit l’un d’eux, tourner la sotte rage.
— La science est un mont où je ne puis gravir.
— Tu n’as que ce refrain. Eh ! fut-il plus facile
A Victor, à Léon, à ton cousin Achille ?
Sans les mêmes efforts les pensais-tu ravir,
Ces leçons du passé, ces grâces du langage,
Du luth et des pinceaux ce talent si chéri, ,
Ce trésor qui peut fuir la fortune volage,
El contre les ennuis l’élever un abri.
Va ! comparée aux fruits dont nous couvrons la cime,
La peine que tu plains ne vaut pas qu’on l’estime.
A toi donc aujourd’hui l’honneur d’y parvenir I
On l’avoue avec toi, l’accès est difficile :
Mais, en quel champ fertile,
Sans les soins du présent, vois-tu l’homme obtenir
Les douceurs de l’avenir ? »
“L’Enfant et les Livres”