Un jour de printemps, une abeille ,
Jeune et sortant pour la première fois,
Butinait sur les fleurs à côté d’une vieille,
Qui lui dit tout à coup, en élevant la voix :
— Ma sœur, lève la tête ;
Ne vois-tu pas venir du bout de l’horizon
Ce gros nuage noir qui porte la tempête ?
Vite, crois-moi, regagnons la maison.
— Oh ! le nuage est loin et notre aile est rapide,
Vous vous alarmez sans raison,
Je ne suis point, moi, si timide.
— Hâtons-nous, viens, ma sœur. — Je ne le puis :
Ma charge est encor incomplète.
— Qu’importe ; viens, je le répète.
— Une minute, et je vous suis.
— Mais le nuage arrive, et sur l’insecte frêle
Ont fondu tout à coup et la pluie et la grêle.
Il veut partir alors. Hélas ! c’était trop tard :
L’infortuné périt en route.
Presque toujours, mes amis, il en coûte
De n’avoir pas suivi les conseils du vieillard.
“Les deux Abeilles”